Invité du café littéraire de Bouzeguene pour présenter son dernier roman « Orphelin de fils », titre sciemment donné et choisi par l’auteur pour interpeller le lecteur. Azzedine Idjeri est un écrivain qui transcende les codes littéraires et les thèmes que jusque là la littérature Algérienne n’a pas encore débattu. D’abord « Orphelin de fils » n’est pas un roman autobiographique et moins une histoire tirée d’un fait réel. Toute l’histoire et les personnages sont purement fictifs. Les sens de la famille, les vicissitudes de vie quotidiennes les relations conflictuelles et les antinomies de la vie y sont représentés d’une manière plus subtile comme dans un tableau de peinture. Le fils voit, en son père, un possible reflet de sa propre évolution. Quant au père, sa progéniture est un miroir tendu sur sa prime jeunesse. Les personnages du roman sont en quête de rédemption, de sempiternels fouilleurs non pas de conscience mais de vérités, de solutions à leurs problèmes. Certes tout est complexe dans cette histoire, écrit avec un style très différent où le spatio-temporel n’existe pas. Il porte haut et fort sa plume pour mieux donner la parole aux insignifiants, aux malades mentaux, aux suicidaires et aux solitaires. « Je me suis lancé dans une sorte d’intrigues inextricables, parlé aussi de la conscience de soi-même » disait l’auteur mais un sujet aussi philosophique, en un mot, un labyrinthe psychologique. Un père solitaire comme un loup invente un fils imaginaire pour combler le vide laissé par la disparition de sa femme décédée, encore pour des raisons inexpliquées. Pour justifier sa raison de vivre, son existence, il décide de se consacrer corps et âme à lui en l’éduquant. L’enfant imaginaire grandit, le laisse à son rêve, à son activité psychique interne. Le père sait tout du fils, de ses fantasmes, de ses préoccupations. Le rêve est omniprésent : trouver une présence féminine.
Dans le premier cas, ils sont réconciliés, l’un devient l’autre, se mêlant de manière fusionnelle comme des ruisseaux. Cette relation devrait être culturellement d’importance mais ne l’est pas. Le rêve devient réalité, à l’occasion du 10 eme anniversaire de l’enfant. Ines fait une intrusion dans leur univer, frappe à la porte et entre à la maison que l’enfant imaginaire a inventée. Le rapport de force s’inverse. Le père qui s’est inventé un fils imaginaire ne maitrise plus la situation car ce fils a repris le pouvoir et s’est inventée une mère. Le père existe réellement mais disparait. Au lieu de terminer son histoire avec un père absent et un dénouement heureux entre le fils et la mère. C’est l’éternel recommencement qui revient comme un cheval au galop, les intrigues refont surface comme une mer déchainée avec des vagues hautes et un maelström de sons et d’images qui hanteront nos têtes vacillantes. Il disait « c’est un roman complexe mais c’est ma façon d’écrire, et aussi d’être sincère… ». Ines, la mère biologique, affective et existante, tend la main à Adam pour lui montrer le chemin de la guérison. Adam a tout raconté et devient le narrateur, la force tranquille afin de perpétuer l’espèce humaine pour l’éternité.
Amroun Omar